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MANUEL DE l'AMOUR MODERNE

MANUEL DE L’AMOUR MODERNE évoque avec un comique grinçant une sorte de traité du savoir-vivre du couple moderne, donne un aperçu de la mentalité des années 60 en la matière.  Le premier acte situe en 1959, dans la première époque du baby boom et au moment de la guerre d'Algérie. L'acte II se situe peu de temps après le mariage, l'acte III dans un temps indéterminé. Ce texte de fiction s'appuie sur une base documentaire : les discours de médecins, de psychologues et de sexologues des années 60, dont les références sont davantage Balzac, Michelet, Stendhal, que Freud, qu'ils semblent de ne pas connaître. A l’époque, les mairies distribuaient des consignes aux jeunes mariés avant le mariage, entre autres pour prévoir la catastrophe de la nuit de noces, souvent commencée par un viol, comme le dénonce Balzac dans Physiologie du mariage.

Nous avons eu au départ l’idée d’une installation itinérante : un cabinet de curiosités autour de la vie dans les années 60. Plusieurs pistes : la mise en scène des objets électroménagers, mais aussi des traces, de la mémoire contenue dans l’espace de la cuisine. Quel rapport à la mémoire individuelle et collective ? Quelle manière d’envisager les circulations du couple, les rôles familiaux et sociaux dans l’espace de la cuisine ?

La pièce Manuel de l’amour moderne appartient à ce qu’on pourrait appeler un « Cycle du formica ». La Matrice I. Le temps des musons avait déjà pour décor une cuisine en formica complète. Elle était un lieu- laboratoire, elle jouxtait un espace invisible, qui renvoyait à la mémoire, mais aussi à un espace possible de l’écriture.  Un personnage avait été englouti dans cet espace.

La scénographie du spectacle est constituée d’une série de chaises en formica, et d’une collection d’objets ménagers des années 60 censés libérer la ménagère. Or, dans le spectacle, ces chaises, comme ces objets, vont se retourner contre le personnage féminin. En ouverture du spectacle des étudiants donnent, dans le décor, une performance intitulée « litanie aux objets » (publiée en annexe dans la pièce parue aux éditions Domens).

 

Avec Yves Gourmelon, Pierre-Jean Peters, Julie Pichavant

Lien vers le taser du spectacle

https://vimeo.com/248671558

https://www.facebook.com/lydie.m.parisse

"Une sorte de  docu-fiction"

« Un Manuel de l'amour moderne, vaste programme ! C'est ce livre de grammaire amoureuse qu'apporte le docteur Vir, homme d'état  et du corps médical. Il prêche, dans cet espace pareil à un petit musée des années 60, la bonne parole du bonheur conjugal, une bonne parole qui n'a pas celle des femmes et qui reste orientée, bien entendu, vers la réalisation d'une société tranquille et uniforme.

Elle, pourrait être la fille de son époux, plus cultivée et sans profession - obéissant à son mari qui ne veut pas la voir travailler. Elle ne parle pas beaucoup, et au cas échéant il lui intime de se taire. Lui, élevé par son grand père, en première ligne pendant la guerre d'Algérie, ne sait pas lire (...). Une rencontre quand elle avait seize ans : enceinte avant le mariage et voilà le contrat signé pour le meilleur et pour le pire dans un village de campagne.

Le spectateur suit la chronologie de l'histoire, cette descente aux enfers qui marche à merveille, et assiste comme à des parenthèses conférencières où les trois comédiens lisent, tout en gardant une légère trace de leur personnage. Projections, voix enregistrée comme sortant d'une radio de l'époque, schémas anatomiques, positions corporelles significatives - tout le vocabulaire du documentaire est là, avec ses passages de vie in médias res, et le couple n'est qu'un prototype, une copie de beaucoup d'autres de l'époque. Les jeux de lumière marquent eux aussi les allées et venues dans les différents espaces dramatiques.

Ainsi les femmes sont-elles des êtres délicats dont il faut bien s'occuper : les hommes doivent être initiés à la manipulation de ces fragiles créatures, souvent trop malheureuses, suite à la brutalité de leur mari. Cela afin de créer un couple heureux sur le plan amoureux et sexuel, car le mariage est la bonne voie pour la paix et l'apathie sociale. Cependant, si les consignes et les explications du docteur Vir paraissent parfois aberrantes, arriérées ou contradictoires, il en est que le texte fait drôlement résonner aux oreilles d'un public qui rit parfois de reconnaître les piliers de la conjugalité actuelle...

L'ensemble témoigne d'un très bon travail sur la distance et l'identification, les comédiens enlevant et rebattant le quatrième mur à leur guise, ainsi que d'une belle écoute au sein du trio. »

Morgane Nagir, Le Clou dans la Planche, 2 mars 2013

 

"Quoi de neuf doc?"

« Alors que la féministe Clémentine Autain a lancé en novembre dernier un manifeste contre le viol, Lydie Parisse, elle, signe un texte intitulé Manuel de l'amour moderne qui nous rappelle quelques vérités historiques sur les rapports sociaux entre les hommes et les femmes. 

Années 1960. Bien avant les réformes de politique familiale effectuées sous la présidence de Giscard d’Estaing (abolition du pater familias, responsabilité partagée de l’homme et de la femme dans la famille, loi Veil sur l’IVG, loi sur le divorce par consentement mutuel…), quelques « spécialistes » du corps médical cherchent à « civiliser » le couple (il n'est pas rare en effet que la lune de miel commence par un viol). Un certain Docteur Vir, interprété par Yves Gourmelon, par ailleurs co-metteur en scène de la pièce avec Lydie Parisse et fondateur de la troupe Théâtre au présent, entre en scène. Ce médecin - un personnage haut en couleur, à la fois comique et chaleureux et d’une autorité caricaturale, avec son chapeau Napoléon- cherche avec grand-peine à réconcilier ces deux inconciliables que sont l'amour et le mariage. Coincé entre deux époques, il défend l'utopie d’une société moderne fondée sur la refonte du couple tout en continuant à véhiculer des préjugés ancestraux légués par la religion, le patriarcat et l'ordre moral. S’il harangue le jeune couple (le mari -Pierre-Jean Peters- qui travaille à l’usine, frustre et taiseux et la femme -Julie Pichavant- au foyer soumise, schéma archétypal populaire et ouvrier de cette période) d’un tonitruant « vive la paix et vive l’amour ! » (quelques années avant le « peace and love » de la révolution de 1968), il n’hésite pas à citer l’encyclique du Pape Pie XI de 1930… C'est dire... 

Pour leur mise en scène, le couple Gourmelon-Parisse a choisi un espace scénique entièrement conçu autour de la cuisine en formica, il est à la fois le lieu de perdition et d’émancipation de la femme. Il sert aussi de langage des extrêmes, de la douleur au plaisir : les objets ménagers peuvent servir comme instruments de torture ou comme godemichés… »

Mathieu Arnal, Le Brigadier, 26 décembre 2012

 

http://www.theatre2lacte-lering.com/lering/event/manuel-de-l-amour-moderne/

 

Les photos sont de Julie Imbert.

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